Laurent Ribérat 1980-2000

Exposition
24 avril 2002

Laurent Riberat est un artiste autodidacte et marginal, la peinture a été au centre de toute sa vie, excluant famille et travail.

Son œuvre effectue un cheminement entre art contemporain pour certaines de ses pièces et art brut pour les réalisations sur le carton ou la sculpture.

Laurent Riberat était un grand ami de Christian Louis le photographe, décédé voici quelques mois. Il vit et travaille à Saint-Jean-Pla-de-Corts.

L’indépendant 22 mai 2002
Les mémoires de couleurs d’un peintre rustique

Le musée d’art moderne de Céret expose jusqu’au 5 juin les toiles de Laurent Riberat, un bel hommage à une figure locale et à un peintre plus soucieux de sa liberté que de sa renommée.

Ce grand gaillard ébouriffé aux yeux clairs, ce colosse de plus de quatre-vingt ans avait le regard d’un enfant émerveillé en découvrant ses œuvres encadrées et dont les couleurs éclatent sur les murs blancs du musée d’art moderne de Céret. Laurent Riberat était accueilli par une foule d’amis et d’admirateurs autant attachés au personnage qu’à sa peinture éprise de liberté. Il avouait même malicieusement que pour la circonstance, il était allé chez le coiffeur pour la première fois depuis cinquante ans…Une petite concession au protocole des vernissages un peu guindés où l’art de la représentation est de mise.
De 1980 à 2000. Joséphine Matamoros a réussi le tour de force d’arracher à ce vieux loup solitaire un grand nombre de toiles et de papiers qui avaient échappé au recouvrement, à l’oubli total, à la déliquescence du temps.
Cela donne une exposition manquant quelque peu de cohérence, les périodes et les inspirations s’y croisent, mais la sensibilité de l’homme et la vision de l’artiste donnent le fil conducteur à cet émouvant hommage.
La couleur avant tout. C’est la compagne de toute une vie, l’objet de la quête, la source d’inspiration, la lueur qui éclaire le difficile chemin de la création. Laurent Riberat, artiste de l’ombre et de solitude semble user de la couleur avec la délicatesse des hommes forts, comme s’il avait peur de la blesser, de la contrarier. Pas de confrontation ni de contraste violent, plutôt la recherche d’une douce fusion, d’un rapprochement.
Même dans les toiles plus violentes des années quatre-vingt où il sature un peu plus ses huiles, Laurent Riberat évite l’affrontement direct en y plaçant de forts contours noirs.
Abstraction poétique. Le peintre recherche l’émotion au cœur de la couleur, passant et repassant sur la toile ou le papier, par touches successives, laissant les transparences s’installer, rehaussant l’ensemble de vifs coups de brosse, jouant de la trace, étirant la matière jusqu’à son absence. Laurent Riberat aime la peinture maigre.
Dans une petite série, l’artiste s’amuse avec une envolée d’improbables oiseaux en pleines acrobaties aériennes et lyriques, dessinés à traits légers, qui donnent le mouvement à ces tableaux aux tons fanés.
Le travail de Laurent Riberat est celui d’un peintre qui a su garder la fraîcheur d’âme et cette part d’innocence que la vie s’acharne à nous faire oublier.

Jean-Michel Collet